Alfredo Benoît MOLET

 
 
  Le Petit Journal propose en décembre de découvrir les français qui ont eu une influence importante en Argentine. Pour le premier volet de cette série, Viviane Oteiza, anthropologue argentine et spécialiste de l'immigration française, décrypte, la typologie des premières vagues de peuplement français en Argentine 


(Immigrants au débarquement / DR)

L’immigration française allie quantité et qualité. Après les colons espagnols, les Français ont été la deuxième nationalité à débarquer en nombre sur les rivages du Río de La Plata, attirés par la publicité faite par les élites argentines en tournée en France comme Sarmiento, personnage politique et futur président. Même si la déferlante italienne a, par la suite, relégué les Français à la troisième place en nombre d’immigrants. Moins constante que l’immigration espagnole et moins massive que les « Tanos », l’immigration française –dont il subsiste de nombreux noms de famille- a néanmoins, à sa manière, marqué le pays. Elle se distingue notamment par sa grande influence au niveau social et culturel.  
 
Une grande influence sur la construction du pays
"L'influence française a marqué de nombreux domaines : éducation, médecine, architecture, système juridique, aviation et journalisme… "cite Viviane Oteiza. Cette patte française est notamment due à la présence de Français qui participent à l'origine du développement de ces secteurs. Par exemple, "le journalisme se développe très fortement en France, notamment sous Louis XIV, il se renforce encore pendant tout le processus révolutionnaire et devient un véritable modèle international que les Français immigrés en Argentine recréent" explique Viviane Oteiza. Ainsi plusieurs Français créent le Courrier de La Plata, publication en Français qui subsistera jusqu’à la deuxième guerre mondiale. 
Autre facteur d'influence, les Français débarquent avec du savoir mais aussi des capitaux. En effet, la France se place en seconde position, après le Royaume-Uni, en ce qui concerne l'argent investi dans le pays. Des banques comme celle de Paris et des Pays-Bas (ex-Paribas) ou la Société Générale misent sur ce pays prometteur, en développement. 

Intellectuels et paysans cultivés
Même si parmi les Français qui débarquent, on trouve de nombreux paysans et hommes de la terre, il s’agit, selon Viviane Oteiza qui cite les propos de son collègue Hernan Otero, d'une "immigration médiane", issue d’une classe plutôt moyenne. Ainsi, le taux d'alphabétisation de ces immigrés français approche selon des études les 88%, soit une bonne éducation pour l'époque. Les Britanniques immigrés en Argentine sont encore un niveau au dessus des Français : on peut alors parler de classe supérieure, venue quasi exclusivement pour le commerce en quantité bien moindre. L'immigration française n'est pas aussi populaire que l'immigration italienne, dont la plupart des individus n'avaient pas d'autres choix que de quitter leur pays d'origine à cause de la pauvreté. Les Français d'Argentine comptent aussi de nombreux intellectuels, certains s’opposant aux régimes de Louis XVIII, de Louis-Philippe, et plus encore après le coup d'état de Louis Napoléon III et contraints à l’exil, d'autres possédés par un rêve. Viviane Oteiza précise, "le meilleur exemple en est le Courrier de La Plata auquel participe de nombreux Français de l'époque".
Mais l'immigration française est composée d'un grand nombre d'agriculteurs, notamment du sud-ouest. Pays Basque, Béarn, Aveyron et Savoie sont les régions les plus représentées. Une communauté d'aveyronnais fonda d'ailleurs la ville de Piguë, à Bahia Blanca, où flotte toujours un parfum de France.
Parmi ces Français débarqués, plusieurs d’entre eux ont construit et marqué l’Argentine moderne. Des portraits de plusieurs d’entres eux seront proposés dans cette série. 
Grégory Varagnol (www.lepetitjournal.com - Buenos Aires) le 3 décembre 2008



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